Gestion des déchets au Bénin : la stratégie de la SGDS-GN

Esteve Agbota
5 min readMay 26, 2021

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La question de la gestion des déchets représente une problématique majeure dans de nombreux pays, particulièrement dans les pays africains. A l’heure où ces questions environnementales sont au centre des préoccupations à l’échelle internationale, il urge de développer des stratégies de prise en charge efficace des déchets. Dans ce contexte, la Société de Gestion des Déchets et de la Salubrité Urbaine du Grand Nokoué (SGDS-GN) a été créée en 2018 par le gouvernement Talon pour améliorer la salubrité publique à travers un nouveau dispositif de gestion des déchets solides ménagers dans le Grand Nokoué.

Nous avons rencontré Monsieur Valéry LAWSON, Directeur Général de la SGDS-GN et Madame Assia LONGLADE, responsable des communications pour discuter de la situation actuelle, des stratégies et des ambitions de la SGDS-GN pour améliorer la gestion des déchets au Bénin.

Quelle est la situation actuelle de la gestion des déchets dans le Grand Nokoué ?

Ce territoire regroupe les villes de Ouidah, Abomey-Calavi, Cotonou, Sèmè-Podji et Porto-Novo.

A première vue, la quantité de déchets générés par ces ménages semble impressionnante. En réalité, les statistiques montrent qu’en 2019, il y avait plus de 400 000 tonnes de déchets à collecter et à gérer de façon durable pour une superficie d’environ 1 200 km2, soit 10% du territoire béninois.

En moyenne, chacun des 2 300 000 habitants du Grand Nokoué génère 174 kg de déchets par an (nous n’avons pas eu accès aux données concernant la production nationale). A titre comparatif, la moyenne ivoirienne s’élève à 234 kg par habitant par an, tandis qu’en France, chaque habitant produit 354 kg d’ordures ménagères. Sur cette base, le Grand Nokoué est un petit producteur de déchets.

Avant la SGDS-GN, il n’y avait pas vraiment de stratégie nationale structurante : le peu de collecte réalisée n’était rendu possible que grâce à des associations telles que l’ONG Bethesda. Toutefois les déchets restaient essentiellement dans les quartiers, entassés dans des dépotoirs sauvages et bas-fonds.

Aujourd’hui, la SGDS-GN a réorganisé la gestion des déchets solides ménagers, à travers les étapes suivantes :

  1. Collecte (ou pré-collecte dans les zones à accès difficiles) ;

2. Point de regroupement pendant 24h maximum ;

3. Centre de transfert (ayant une capacité plus grande que les points

de regroupement) ;

4. Sites d’enfouissement (SE).

Le diagramme ci-dessous décrit ce nouveau processus mis en place par la SGDS-GN dans la zone du Grand Nokoué.

https://www.sgds-gn.bj/nos-activites/gestion-des-dechets/

Il faut cependant mentionner que les dernières étapes de valorisation et d’optimisation au niveau des sites d’enfouissement ne sont pas encore mises en place.

Quelles sont les stratégies de gestion de déchets de la SGDS-GN ?

Aujourd’hui avec la SGDS-GN, 100 % des déchets sont enfouis.

Toutefois, cette stratégie d’enfouissement est loin d’être la meilleure méthode car elle a des impacts non-négligeables sur la salubrité de l’environnement, surtout en absence de tri au préalable. En effet, les deux problématiques majeures de l’enfouissement sont : le lixiviat et les biogaz. Le lixiviat est le liquide obtenu après le passage de l’eau (de pluie par exemple) à travers les déchets en décomposition. En s’écoulant dans le sol, il transporte des polluants (éléments minéraux, chimiques et organiques). Cette eau usée, qui peut s’infiltrer dans les rivières et nappes phréatiques alentours, pollue ainsi la ressource en eau.

Le biogaz se forme pendant la décomposition de la matière organique. C’est un mélange de méthane et de dioxyde de carbone principalement, gaz qui contribuent à l’effet de serre et au réchauffement climatique.

Limites de la stratégie actuelle de la SGDS-GN

S’il faut reconnaître que l’enfouissement représente une relative amélioration visuelle comparée aux dépotoirs à l’air libre dont nous avons l’habitude, cela reste encore loin des principes de gestion des déchets au niveau international tels que les 3RV-E. En effet, cette approche de gestion des déchets est utilisée dans plusieurs pays au niveau international comme le Canada et la France.

Cependant, pour ne pas reproduire le cas où des politiques qui ont fonctionné à l’extérieur ont échoué au Bénin, il faudrait adapter cette approche au contexte local.

En effet, la SGDS-GN nous a informés de leur objectif de réduire de 50 % la quantité de déchets enfouis d’ici 2024.

Cela nécessitera le développement de plusieurs actions telles que le tri sélectif et le recyclage en adoptant les principes de gestion des déchets des 3RV-E à travers :

• Réduction à la source : prévention ou réduction de la production de

déchets ;

• Réemploi : utilisation répétée d’un produit en le modifiant peu ou pas

du tout ;

• Recyclage : transformation et réintroduction dans le cycle de

production pour fabriquer de nouveaux produits ;

• Valorisation : transformation pour obtenir une nouvelle matière

(exemple : énergie, compost) ;

• Élimination : incinération, enfouissement.

On voit que dans cette logique des 3RV-E, l’enfouissement est la dernière étape du processus, pour les matières non récupérables et non valorisables.

La vision de la SGDS-GN pour le futur

La SGDS dans le long terme vise la mise en place du principe des 3RV-E afin de promouvoir la réduction à la source, le tri sélectif, le recyclage et la réutilisation des matières.

Pour ce faire, des politiques de sensibilisation des populations aux 3RV-E seront nécessaires aussi bien qu’un investissement conséquent dans des unités de recyclage et de valorisation.

Pour se donner les moyens d’exécuter cette politique de gestion des déchets, la SGDS-GN a un budget de financement de 57 milliards sur 7 ans et envisage de créer 10 000 emplois sur cette période ; 5 000 emplois sont déjà créés depuis le début de leurs activités en juillet 2020.

Le Bénin, à travers la SGDS-GN, vient de faire un grand pas dans la gestion des déchets solides ; mais l’enjeu demeure les 3RV-E surtout dans un contexte de changement climatique.

Par ailleurs, plusieurs questions demeurent dont celle de l’adaptation de ce principe de gestion des déchets aux réalités sociales béninoises, ou encore celle de l’élargissement de la stratégie actuelle à tout le territoire béninois.

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Written by Esteve Agbota

Expert en Génie de l'Environnement

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